Les tournois

Introduction

Un tournoi n'est pas uniquement l'occasion de montrer sa prouesse. C'est un exercice de lustre social inégalé, permettant d'étaler son honneur, sa bravoure et son adresse. Ces évènements sont également une arène politique, encourageant souvent la compréhension entre régions et permettant aux participants de résoudre leurs différends sans carnage. Une partie de plaisir se trouve aussi dans les festins, les amusements et l'interaction entre les participants et les Dames.
La mise sur pied d'un tournoi est une entreprise élaborée, nécessitant une planification et beaucoup de temps, un esprit réfléchi et des finances.

Origine

Suivant une chronique Angevine du XIIème Siècle, on devrait l'invention des tournois à un certain Geoffroy de Preuilly qui mourut à Angers en 1066.
On sait par plusieurs textes que dès le XIIème siècle, les torneamentum ou conflictus gallicus sont très en vogue.
Sans doute les tournois ont-ils dû atteindre, sous l'influence de l'institution de la chevalerie, à un degré de splendeur qui a pu paraître leur donner une origine nouvelle : cependant, il fut reconnaître que, presque de tout temps, chez toutes les nations belliqueuses, l'élite des guerriers s'est exercée, par des combats simulés, au métier des armes, et en France même on trouve des traces de jeux de ce genre avant les Xe et XIe siècles.
Il n'a évidemment pas fallu attendre longtemps pour comprendre l'intérêt de l'entraînement, mais le tournoi apporte une dimension supplémentaire : il met le chevalier dans en situation réelle de combat. L'apparition et la diffusion des joutes résultent probablement de l'amélioration de l'équipement du chevalier.
Le terme tournoi décrit le mouvement effectué par les chevaliers après leur charge pour en préparer une nouvelle. À moins qu'il ne s'agisse de l'errance des chevaliers, allant de lieux en lieux, la question reste ouverte ...

Historique

Au départ, il s'agissait de véritables combats entre deux groupes de chevaliers. Ces premiers tournois permettaient de maintenir une certaine forme physique mais surtout d'agrandir sa renommée et sa fortune. En effet, les vainqueurs capturaient leur adversaires et faisaient payer une rançon à leur famille.
Dès les premiers tournois, l'Église tenta de mettre un terme à ces affrontements. Les papes (Eugène III, Innocent III) et les conciles (Lyon, 1245) condamnèrent la pratique du tournoi.
Philippe Auguste, roi de France, interdit à ses enfants d'y prendre part.
Saint Louis les interdit en 1260, afin d'orienter contre les infidèles la vertu belliqueuse des chevaliers chrétiens.
Deux phrases du Concile de Latran II de 1139 permettent de voir jusqu'où va le dégout de l'Église :
  • "Nous interdisons formellement ces foires détestables où les chevaliers prennent l'habitude de se rassembler pour montrer leur force et leur audace insensée, d'où il s'ensuit souvent la mort pour les hommes et le péril pour les âmes".
  • "Si l'un d'eux y périt, il sera privé de la sépulture chrétienne, sans que lui soient retirés ni la "pénitence" ni la "viatique""
    Après avoir renouvelé l'interdiction (1280, 1296, 1304, 1311, 1314) en la justifiant par la nécessité de privilégier le combat pour la défense du royaume, ses successeurs tentent d'en prendre le contrôle ; cependant que les papes les interdisent certains jours. Les tournois n'en continuent pas moins d'avoir la ferveur de l'aristocratie et celle du peuple, pour qui ils constituent une fête. Les princes et les barons en organisent tout au long des XIVème et XVème siècles.
    Les nobles dirigeants étaient quant à eux mitigés vis à vis de l'avis à prendre. Parfois, ils considéraient ceci comme un excellent exercice aussi bien individuel que collectif et parfois comme un attroupement prétexte à de nombreuses intrigues ou pouvant affaiblir le potentiel militaire d'une région si trop de chevaliers étaient blessés.
    Les tournois furent par la suite améliorés pour devenir des manifestations hautes en couleurs où l'on se battaient pour "l'amour" du combat. On utilisait alors des armes dites courtoises ou de plaisance (comparativement aux armes de guerre dites armes d'outrance). De nombreuses règles furent ajoutés afin de rendre encore plus noble cette événement. On y incorpora des banquets et des danses afin d'attirer également les non combattants.
    Parallèlement, le tournoi était l'occasion pour les gens plus humbles de s'amuser. En effet, le tournoi attirait des marchands de toutes sortes allant de l'armurier à la diseuse de bonne aventure et parfois même des prostitués. Tout cela faisait ressembler les à côté à un grand carnaval.
    Il arriva parfois que la drôlerie eu sa place dans ces tournois c'est ainsi qu'en 1286 se déroula à St Jean d'Acres un tournoi où les équipes s'affrontèrent en habits de femmes et de religieuses.
    Le déclin des tournois commença au XVème Siècle, ceci certainement dû aux échecs des croisades et à l'évolution des armes (archers, arbalétriers et artillerie). On leur préféra alors des événements plus simple comme le duel à cheval ou les béhours (version simplifié de la mêlée). Au XVIème Siècle, la chevalerie cessa d'être un idéal de vie pour les classes nobles entraînant la disparition définitive des tournois.

    Une pratique dangereuse

    Le tournoi est un apprentissage du combat. C'est un véritable combat équestre, à armes réelles. Comme tel, aux XIème et XIIème siècles il est encore une épreuve redoutable où sont fréquents les accidents mortels. Le Duc de Bretagne Geoffroy III Plantagenet trouve la mort dans un tournoi à Paris en 1186. On comptera toujours des morts, comme le Connétable de Brienne en 1345 et le roi Henri II en 1559.

    Organisation : Taille et Calendrier

    L'organisateur doit d'abord décider du nombre de participants qu'il désire inviter. Si tous les tournois présentent à la base les mêmes attractions, le nombre de participants et de spectateurs fait la différence.

    Coûts

    La préparation du site, les fournitures, le festin et les constructions différents de la taille du tournoi au niveau du coût.
    La taille du tournoi étant décidée, l'hôte doit planifier sa date sagement, l'incluant à l'avance dans le calendrier social du royaume, de sorte que les dates n'entrent pas en conflit avec d'autres tournois, à moins bien entendu que la personne ne veuille délibérément nuire à un autre organisateur.

    Les préparatifs

    D'abord des émissaires sont envoyés partout pour les annonces et les invitations.

    Annonce du tournoi

    Pour assurer le succès du tournoi, il convient de l'annoncer aussi largement que possible. L'hôte prévoyant d'organiser un tournoi doit s'assurer que les gens sont informés de l'affrontement à venir. C'est la tâche du héraut. La plupart des organisateurs ont plusieurs hérauts à leur service, et s'ils parviennent à transmettre le message à tout un réseau de connaissances, ils sont rarement en nombre suffisant.
    Avant que le tournoi ne débute, il fallait pour l'organisateur réunir suffisamment de protagonistes. Pour ce faire, il envoyait au château avoisinant (voir dans les pays voisins s'il s'agissait d'un tournoi royal) des émissaires chargés de proclamer le "Ban" du tournoi et de distribuer des "Cartels" d'invitations. Grâce à ces émissaires, la nouvelle se répandait rapidement et certains chevaliers n'hésitaient pas à voyager plusieurs semaines pour y participer.
    Lors de l'annonce d'un tournoi, les hérauts doivent annoncer toute règle particulière valable pour la compétition, par exemple si le tournoi comprendra une mêlée entre une équipe de combattants locaux et une équipe ouverte aux autres. Ces règles sont toujours déterminées par l'hôte du lieu et varie d'un tournoi à l'autre.
    Certains invités envoient des réponses dans lesquelles ils s'engagent à venir, mais la plupart des concurrents arrivent simplement à la date du début.

    Autres préparatifs

    Du personnel doit éventuellement être embauché: maîtres queux, bardes, amuseurs, acrobates, conteurs, etc. Le site doit être préparé. Les tournois se déroulent en un lieu nommé Lice, entouré d'une solide barrière. Une barrière plus élevée est dressée autour, elle délimite l'espace réservé à l'équipement et aux écuyers.
    Il faut déterminer le lieu du rassemblement; dans les villes, sur la place du marché; dans la campagne, lorsque le déploiement d'hommes et de matériel requière un espace plus étendu.
    il faut fixer l'emplacement des combats armés. L'esplanade où les champions devaient se mesurer était entourée de lices, c'est-à-dire de barrières de bois, flanquées d'une tribune destinée aux spectateurs. Les dimensions étaient inférieures à cent mètres, de façon à rechercher le corps à corps. De plus, le fait de lancer les chevaux au galop sur des distances plus courtes atténue la violence du choc au moment du contact.

    Les représentants de l'hôte

    Afin d'être bien représenté à son propre tournoi, l'hôte doit choisir un Héraut d'Armes ainsi qu'au moins deux personne qui joueront le rôle de Juges Diseurs et de Poursuivants d'Armes.
    Le Héraut d'Armes remplit une fonction essentielle pour la réussite du tournoi et doit posséder de solides compétences administratives ainsi que la faculté d'imposer le respect à tous les participants.

    Cérémonie d'ouverture

    Les nombreux concurrents arrive peu à peu au cours des jours précédant l'évènement. Le temps n'est pas au repos : les préparatifs sont finalisés, les chevaux ferrés de neuf, les armures déchargées, les armes émoussées en vue de l'épreuve.
    Les participants venaient présenter leurs hommages au seigneur organisateur. Ils passaient ensuite devant le juge diseur qui enregistrait leur inscription et vérifiait leur droit à participer.
    Les alentours du château se garnissaient alors de tentes aux couleurs et armoiries des chevaliers. Ces mêmes armoiries étaient accrochés aux fenêtres du château afin que tous puissent voir les participants et éventuellement dénoncer les peu honorables.
    Lorsque tous les participants étaient réunis, le tournoi pouvait commencer mais chacun devait passer une dernière fois devant les juges sans son casque pour éviter toutes tricheries.
    Il était possible à un chevalier de participer incognito. Pour cela, il devait en faire la demande au moment de son inscription et seul les juges étaient au courant de son identité.

    Grande Parade de Présentation

    Avant d'en venir aux coups, il est bon qu'un concurrent connaisse la nature de ses adversaires. La grande parade de présentation donne à tous les participants l'occasion de relater leur passé et ses faits d'armes. Au début de la journée, les spectateurs se rassemblent sous les pavillon et attendent la procession. La colonne s'avance, précédée de hérauts et flanquée de ménestrels, les participants chevauchent fièrement de front. Les hérauts de chaque concurrents rivalisent alors d'éloges pour convaincre la foule des vertus de leur maître.

    Le Tour des Heaumes

    Au matin du jour d'ouverture, l'hôte doit prévoir un tour des heaumes. Chaque participant doit montrer son heaume et son cimier. L'hôte désigne des juges pour examiner chaque concurrent, qui s'assurent que seuls les hommes dignes d'être admis seront acceptés dans les lices. Si des participants présents ont transgressé les règles du tournoi, l'hôte doit les expulser afin de ne pas ternir la réputation de l'évènement et ne point offense ses invités.
    Les Dames choisissent le participant le plus impressionnant, basant leur décision en premier lieu sur l'apparence des candidats et sur leur réputation.

    Le participant choisi aura pour tâche de couper les cordes afin de signaler le début de la mêlée.

    Le festin de bienvenue

    La soirée du jour d'ouverture se clôture par un grand banquet. la plupart des invités se rappellent très clairement cette partie du tournoi et c'est souvent l'aune à laquelle ils jugent l'hospitalité de l'hôte.

    La Parade des Prix

    Vers la fin du banquet de bienvenue, le héraut d'Armes de l'hôte doit introduire la parade des prix :
    "Voyez de présent la grande générosité de mon maître, en ces trophées et récompenses. Ceux qui triomphent sur le champ clos repartiront d'ici enrichis de gloire et d'or".
    Les prix doivent être soigneusement choisis, pour forcer l'admiration de l'assemblée. L'hôte doit offrir des prix convenables pour la joute, la mêlée et les défis, ainsi que pour tout concours secondaire du tournoi. Il est sage de prévoir des prix d'une valeur suffisante pour attirer les participants, sans quoi la réputation de l'hôte peut en souffrir.
    Les prix sont divers : couronne, bourse, broderie, rarement un bijou, une armure ou un cheval.
    La meilleure race de cheval disponible peut par exemple constituer un prix convenable pour une joute.
    Pour la mêlée, une arme de qualité supérieur, valant deux fois son prix normal, rehaussée de joyaux et décorée, serait appropriée. Celui qui remportera le plus de défis pourra recevoir une oeuvre d'art, un calice, une broche ou une tapisserie.
    Il est à noter que la plus grande récompense pour le chevalier n'était pas un bijou ou une armure mais bien la reconnaissance de sa vaillance et de son habilité au maniement des armes.

    Déroulement des combats (à l'origine)

    Un tournoi se déroule comme une bataille, il oppose deux camps, formés de chevaliers, piétons, écuyers, archers et garçons, sans que l'égalité des forces soit une règle absolue. En effet, les participants sont libres de rallier le camp qu'ils souhaitent renforcer. Ces regroupements se font sur base de critères multiples : amitiés ou intimités, liens familiaux ou de vassalités, .
    L'aire de « jeu » est vaste, ouverte et mal délimitée : elle englobe champs, bois, villages, voire petites villes servant à un des camps de base à l'un des partis, «ceux du dedans», placés en position d'assiégés. L'assemblée dure plusieurs jours : le premier est consacré au préparatif, formation des groupes ; le second jour est marqué par les « commençailles », qui sont des escarmouches et défis divers en combat singulier, en général le fait des bachelers. Ces jeunes en quête de renommée, viennent provoquer leurs adversaires par des injures, cris ou gestes de défi, les incitant à joster. Les vainqueurs se font ainsi remarquer, gagnant la considération des chefs, à moins que leur audace excessive ne les perde.
    Le vrai tournoi, la mêlée vient ensuite. Comme la guerre véritable, il comporte des phases diverses : sièges, assauts, sorties, embuscades, attaques frontales et fuites simulées. La seule différence est qu'il ne s'agit pas de tuer, mais de vaincre, de capturer, de gagner. Les charges de chevaleries n'ont d'autres fonctions de disjoindre les escadrons adverses pour en isoler quelques éléments, ainsi rendus vulnérables et faciles à capturer. C'est donc à tort que l'on compare les tournois à des affrontements individuels. Il s'agit au contraire de combat très collectifs, servant d'entraînement pour la cohésion tactique des escadrons. Pour capturer un ennemi, il suffit de saisir le cheval par le frein ou, plus prosaïquement, d'empoigner à bras le corps le chevalier et de l'emporter vers ses lignes, les lices. Chaque équipe, en effet, dispose dans son camps de zone de replis, les recets, délimités par des lices, où les combattants peuvent venir se réfugier, soigner leur blessures, reprendre des forces, des armes et des chevaux, déposer en sécurité le butin gagné (armes, chevaux, hommes capturés).
    Au départ, ce sont les participants eux-mêmes qui désignent l'équipe gagnante, mais aussi le meilleur chevalier. En effet, il n'y a pas de public (tout au plus au sommet des remparts des villes avoisinantes). Puis au fil des années, les rencontres se transforment en rencontre mondaines et les jongleurs qui y prennent part chantent les mérites de l'un ou de l'autre. Souvent chevaliers ou ancien chevaliers, ils sont à même de juger de la qualité des exploits. Les chevaliers devenant moins reconnaissables suite à l'évolution des armures (fermeture du heaume, .), les jongleurs (re)connaîtront les participants et leurs armoiries, indispensables pour suivre, commenter la phases ou décerner les louanges. Au siècle suivant, ils formeront la caste des hérauts d'armes, véritable corporation de spécialistes en combats, armes, armures, armoiries et usage chevaleresque, chargés de trancher les différents, d'édicter les règles des joutes et des tournois et de désigner les vainqueurs.

    Malgré tout ce que ces tournois ont de collectifs, il existe quand même des aspects individuels : aux oreilles des chevaliers résonnent les vers chantant les coups de lance des Lancelot, Roland, Guillaume ou autre Yvain. Et comme, même lors d'une charge collective, un chevalier ne peut viser qu'un seul adversaire, bien souvent on cherchait à faire une bonne prise, un plus huppé. De plus, pour assumer la stratégie, pour assurer la cohésion, pour s'entourer des meilleurs chevaliers, des riches princes n'hésitent pas à s'adjoindre les services de champions tel Guillaume le Maréchal. Cet intrépide chevalier, balancé entre le roi de France et le roi d'Angleterre par des liens vassaliques était réputé pour son savoir-faire : en 1077, il prit à lui seul en un tournoi près d'Eu, 10 chevaliers et 13 chevaux. Ensuite, avec un compagnon de route, il prit en dix mois pas moins de 130 chevaliers !

    Evolution des combats

    Les jeux commencent le lendemain des parades. Chaque jour, les candidats joutent dans les tours préliminaires, se préparent pour la mêlée et lancent des défis. De plus en plus de spectateurs se pressent, alors que le nombre de jouteurs décroît et que le jour de la grande mêlée approche.
    Festins et réjouissances animent les soirées; danses, musique et autres divertissements. Les participants visitent le marché, s'assoient sur les douces pelouses ensoleillées et regardent les joutes, quand ils ne sont pas occupés à préparer leurs propres armes et armures.

    Les formes de combats

  • Joute 1 contre 1 : on tente de désarçonner l'adversaire (l'image classique des tournois).
  • Joute de l'anneau : il faut décrocher un anneau avec une lance au galop. Dans cet exercice, le chevalier lance sa monture et essaye d'attraper un anneau suspendu avec le bout de sa lance.
  • Joute du sarrasin/Quintaine : on frappe le bras ou l'écu d'un mannequin au galop avec sa lance, il tourne sur lui-même et risque d'assommer ou de désarçonner le chevalier si on n'évite pas son coup.
  • Combat à la barrière : qui apprenaient les difficultés à vaincre aux approches et aux barrières d'une place
  • Castilles : (ce mot, en langage vulgaire, signifie encore aujourd'hui une querelle, un différend), qui étaient des imitations de l'assaut des tours et remparts
  • Joute dans les mines : qui représentaient les ruses usitées dans les sièges. Mais ces derniers exercices étaient plus rares, et exigeaient des emplacements et des préparatifs particuliers.
  • Jeux équestres : Deux équipes de cavaliers se chargent, font demi-tour puis, à tour de rôle, simulent la fuite. Il ne s'agit pas de combat, mais de simples figures équestres.

    Mêlée ouverte

    Elle se passe en plein air avec des kilomètres de terrains pleins de rivières, de bois, de vignes et mêmes de fermes. Il est possible de dresser des embuscades ou de lancer des percées vers l'ennemi.
    Les seules zones délimitées avec précision sont celles dites de refuge. On les entourait de barrières et les chevaliers pouvaient y souffler un instants ou refourbir leurs armes. Ils sont là en toute sécurité quand le combat fait rage.
    Celui-ci oppose parfois plusieurs compagnies de chaque côté. Tous les coups étaient permis, toutes les armes aussi et aucun arbitre.
    Seules différence avec les vrais combats : les refuges et la règle d'or qui veut que le but soit la capture de l'ennemi ou sa rançon, mais non sa mort.
    C'est un jeu de plaies et de bosses.

    Tournoi pour fantassin

    Les combattants, armés d'une massue et d'un bouclier se répartissent en compagnies dont les membres appartiennent tous à des confréries de jouteurs représentant les différents quartiers de la ville.
    Il y a souvent une petite mise en scène, comme la défense d'un pont entre deux quartiers urbains, un passage entre la "ville basse" et la "ville haute", etc.

    Le Pas d'Armes

    Alors qu'on commence à limiter les risques en émoussant les lances et en remplaçant la brutalité du coup à blesser par l'habileté du coup à rompre la lance adverse d'un écu bien manié, et alors que la barrière longitudinale des lices évite les collisions frontales trop meurtrières, le tournoi s'humanise au XVème siècle avec l'introduction de fictions courtoises et allégoriques. C'est le Pas d'Armes, qui a la faveur des cours dans les années 1470.
    Le Pas d'Armes est le dernier avatar du tournoi, désormais truffé de références littéraires, très en faveur vers 1440-1470 dans les cours de Bourgogne et d'Anjou. Le propos général en est la défense, par un ou plusieurs chevaliers, d'un "pas" ou passage que d'éventuels assaillants s'efforceront de franchir. Le Pas d'Armes diffère donc de la joute par cet enjeu symbolique auquel on donne toutes les significations que suggère le répertoire littéraire - délivrance de la Dame, accomplissement d'un voeu, prouesse pour mériter l'amour de la Dame, etc. - et que souligne un décor complexe à l'ésotérisme codifié. Chaque Pas d'Armes porte donc un nom, allusif au thème historique ou allégorique retenu pour la circonstance : l'Arbre de Charlemagne (Dijon 1443), la Joyeuse Garde (Saumur 1446), la Gueule du Dragon (Chinon 1446), la Pastourelle (Tarascon 1449).
    L'argument du Pas d'Armes est formulé dans une lettre d'armes en vers, qui est un défi adressé en théorie à tous les chevaliers chrétiens et en fait, à ceux que l'on veut inviter. Tout chevalier peut cependant se présenter et les chevaliers errants saisissent naturellement ces occasions de se mettre en valeur et de gagner des récompenses.
    Le Pas d'Armes est l'occasion d'une importante décoration héraldique.

    Les mouvements des combattants à cheval

  • les mouvements des combattants pouvaient s'exercer librement, mais le terrain délimité par les lices est divisé dans le sens de la longueur, par une barrière de bois tendue de drap. Sa hauteur atteignait celle de l'épaule des chevaux, soit cinq à six pieds. Par cette façon de jouter "à la toile", la cloison médiane empêchait les chevaux de se télescoper, en obligeant les cavaliers à s'aborder de flanc et non de front.

    La durée des combats

  • peut être déterminée par le nombre de coup qu'il était convenu d'échanger, les critères quantitatifs allant de 4 "courses" de lances à 25, et même à volonté, c'est-à-dire jusqu'à qu'un des deux jouteurs soit désarçonné ou blessé. Si la rencontre consistait à se battre à la lance, puis à l'épée, le nombre était toujours bien défini pour l'une des deux armes : par exemple, la lance à volonté et 27 coups d'épée, ou un coup de lance et l'épée à volonté.
  • peut être déterminée par le nombre d'atteintes. Il consistait à fixer le quota de lances rompues par combat et à attribuer la victoire au cavalier qui, le premier, réalisait cette norme. Le bois de la lance devait être cassé net, en une ou plusieurs places, entre le fer et l'endroit où le fût reposait sur l'arrêt de cuirasse.
  • peut être déterminée par une composante temps mesurée au sablier, comme rompre le plus de lances possibles en une demi-heure par exemple.

    Les modalités de victoire

  • la chute ou l'abandon d'un des champions.
  • la simple perte de son arme.

    Cérémonie de clôture

    Une fois la sueur et le sang séchés, la poussières retombée et le fracas du fer sur le fer éteint, les récompenses doivent être à la hauteur des efforts consentis. Quand les vainqueurs ont été proclamés et les prix distribués, tous se retirent alors à la grande salle. C'est la que le banquet d'adieu est tenu. Ce banquet était animé par des ménestrels et des acrobates ainsi que par des danses pleines d'entrain.
    Le lendemain les participants comme les spectateurs se préparent, disent au revoir à leurs amis.
    Pour l'hôte organisant l'évènement, la fin est encore loin. Il devra consacrer plusieurs semaines à remettre ses terres en état.


    Références : GAIER Claude, « Technique des combats singuliers d'après les auteurs "bourguignons" du XVe siècle », Le Moyen Age, t. XCI, fasc. 3-4, 1985, p. 430-447.
    livre «La Chevalerie», de Jean Flori aux Éditions Jean-Paul Gisserot


    UN TOURNOI AU XVe SIÈCLE

    Tournoi au 15ème siècle Les joutes et les tournois, où le vainqueur recevait le prix de la main des dames, dénotent bien le mélange de nobles instincts et de penchants grossiers qui dominaient dans cette société belliqueuse, dont ils étaient le divertissement le plus brillant.

    Le tournoi commençait par une série de duels entre deux chevaliers, qui s'élançaient l'un contre l'autre au galop de leurs chevaux et cherchaient à se renverser d'un coup de lance ; il se terminait par le tournoi proprement dit (tournoiement), dans lequel la mêlée devenait générale. On distinguait encore les behourdis, ou sièges simulés ; les combats à la barrière, où deux partis luttaient à pied, avec la hache, l'épée et la masse d'armes, pour se jeter l'un contre l'autre hors de la,lice ; et les pas d'armes dans lesquels un ou plusieurs chevaliers, ayant choisi quelque étroit passage en pleine campagne, y plantaient leur bannière et défiaient tout venant.

    Un seigneur de Touraine, nommé Geoffroi de Preuilli, rédigea un code des tournois qui, dès son vivant, servait de règle en cette matière. Cependant, quoique ce législateur eût prescrit l'emploi de lances et d'épées de bois, on ne se servait guère, dans les tournois, que de véritables armes de fer, pourvu qu'elles fussent sans pointe et sans tranchant ; on les appelait alors des armes courtoises ; mais souvent, à ces joutes, on perdait les membres ou la vie, comme à de vraies batailles.

    La reine de tournoi

    Reine de tournoi Le Livre du "Tournoi du Roi René", composé vers 1450, et d'où est extraite l'illustration de cette page, nous fournit de précieux renseignements sur les mœurs des chevaliers du Moyen Age. Le tournoi, l'une des distractions favorites du seigneur, se déroutait en présence de nombreux spectateurs. Il était présidé par la "reine "du tournoi qui remettait le prix au vainqueur. C'est justement à cette dernière cérémonie que nous assistons ici.

    La "reine", au centre, coiffée du hennin recouvert d'un voile empesé, est assistée de deux demoiselles de son choix; quatre seigneurs en longue robe les entourent. Au premier plan, trois hérauts en cotte d'arme recouverte de l'hermine aux armes de Bretagne. Le duc vainqueur et les autres Sommes portent le surcot ou corset-sangle, court vêtement aux manches à crevés, le haut-dé chausses collant et les chaussures à la poulaine.






    Voir aussi :
  • le traité du roi René : texte original et traduction en anglais (04/04/2003)
  • Sébastien Nadot, Rompez les lances ! Chevaliers et tournois au Moyen Âge


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