Le corbeau

Lorsque les Romains entrèrent en lutte avec Carthage, au commencement de la première guerre punique, leur infériorité dans l'art de la navigation et dans la tactique navale les exposait à des défaites certaines. Le consul Duilius (260 av. J.-C.), pour pallier cette infériorité, imagina de transformer les combats maritimes en combats se rapprochant des combats sur terre. À cet effet, il fit construire une machine dont Polybe nous a laissé la description, et qui reçut le nom de corbeau parce qu'elle saisissait les navires ennemis comme cet oiseau saisit sa proie avec son bec et ses griffes.
Elle consistait en un mât d'environ 7 m de hauteur sur 22 cm de diamètre, planté verticalement à l'avant des navires. Au pied de ce mât tournait, dans des sortes de gonds, l'une des extrémités d'une échelle longue de 10 m et large de 1,5 m, et dont l'autre extrémité était munie, au-dessous d'un croc de fer, et au-dessus d'un anneau. Une corde fixée à cet anneau allait passer dans la gorge d'une poulie installée en haut du mât et redescendait ensuite sur le pont du navire.
Dans le combat, quand un navire ennemi était à proximité suffisante, on lâchait la corde: le corbeau s'abattait sur lui et le croc de fer, pénétrant dans sa muraille, l'immobilisait; les soldats romains pouvaient alors se précipiter à l'abordage du navire ennemi.
Dans l'histoire militaire des Anciens, le mot corvus (corbeau) servait aussi à désigner deux autres machines de guerre particulièrement en usage dans les sièges: le corbeau démolisseur, à l'aide duquel on arrachait les pierres des créneaux et des murailles d'une place forte assiégée, et le corbeau à griffes, qui servait aux assiégés à enlever les ennemis qui s'aventuraient un peu trop près de leurs murailles.

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