Arras, la statuaire de dévotion

Nord - Pas-de-Calais Arras, la statuaire de dévotion Nord - Pas-de-Calais XVe-XVIe siècles

Au XVe siècle, l'évolution du sentiment religieux, la création de dévotions nouvelles, le déve1oppement des confréries amènent les imagiers à produire de nombreuses statues de saints patrons et protecteurs. Pour les représenter, on abandonne les grandes chasubles à plis et la beauté idéale des siècles passés et on les pare de plus en plus des costumes et attitudes des contemporains. La dévotion par laquelle s'exprime la sensibilité religieuse populaire porte alors la marque de cette tendresse presque charnelle pour l'humanité des saints et du Christ.
L'activité artistique est intense en Artois et en Flandre Le bois, abondant et facile à travailler, occupe le premier plan de la production. Les statues de saints sont très nombreuses avant les destructions du XVIe siècle, de la Révolution ou du XIXe siècle. Au XVIe siècle, la moindre église de la région en a une dizaine. Les confréries favorisent cette prolifération et si jusqu'au XIVe siècle, la Vierge, sainte Catherine et saint Michel sont presque seuls à faire l'objet de statues isolées, cette pratique s'étend à la fin du Moyen-âge à de nombreux saints.

Vierge de douleur; statue; 15ème; musée d'Arras
Vierge de douleur; statue; 15ème; musée d'Arras


Le problème du lieu de fabrication de ces oeuvres n'est pas résolu. Le Brabant et la Flandre ont imposé leur esthétique, mais on ne peut en déduire que toutes les statues qui peuplaient les églises étaient importées. Il n'est pas interdit de supposer l'existence d'ateliers locaux, de huchiers (sculpteurs sur bois) comme ceux de Bomy, Hesdin et Saint-Omer dûment attestés aux XVIIe et XVIIIe siècles.
Les Vierges à l'Enfant sont évidemment très nombreuses. Deux statues d'applique, au dos évidé, sont présentées : celle qui provient de Dury (n°61) a conservé sa dorure et sa polychromie. Elle est caractéristique de la sculpture brabançonne de la fin du Moyen Age : plis multiples, cassés, aux bouillonnements enchevêtrés, visage régulier, petit menton rond et yeux légèrement bridés rappellent la peinture nordique de la même époque.
Saint Christophe (n°34) d'un art rustique et savoureux, est tout à fait représentatif de la production courante. Le géant, à la silhouette massive, retient de la main gauche un pan de son manteau, et s'aide du traditionnel bâton pour sa pénible traversée. Sur son épaule, le Christ enfant, le globe terrestre à la main, s'appuie sur la tête du saint. A ses pieds, la sirène évoque tentation, luxure et péché.
Saint Georges (n°32) témoigne d'un art plus raffiné. Le saint, svelte et souple, aux traits juvéniles, terrasse dragon d'un coup de lance. Contrairement à l'iconographie la plus fréquente, qui le montre en cavalier, il est ici debout, les pieds posés sur le monstre pour mieux le maîtriser, dans une pose qui est celle que les artistes donnent en général à saint Michel. La minutie du traitement du costume fournit un intéressant document sur la panoplie d'un chevalier du XVe siècle corselet et braconnière, cuissards, genouillères et jambières, pieds chaussés de solerets.

Saint-Georges terrassant le dragon, musée d'Arras
Saint-Georges terrassant le dragon, musée d'Arras


Saint Sébastien (n°33), d'une grandeur tragique, contraste avec le charme délicat du saint Georges. Le martyr, attaché par les bras (aujourd'hui disparus) à son tronc d'arbre, est vêtu d'un simple pagne, donnant ainsi prétexte à une étude anatomique dont le goût renaît à la fin du Moyen Age. L'artiste a su utiliser, avec une science accomplie les veines du bois, soulignant le torse bombé, le visage anguleux et torturé. Le style indique une provenance du Nord et son caractère expressionniste oriente même plus précisément vers un artiste germanique.

Saint Sébastien, musée d'Arras
Saint Sébastien, musée d'Arras


La dévotion se répand également pour le cycle de la Passion douloureuse de Jésus. La méditation s'attarde sur les souffrances du Christ à la suite des textes de maître Eckhardt (mort en 1327) et d'Henri Suso, deux maîtres à penser de la fin du Moyen Age. Cette dévotion moderne suscite une veine de sculpture réaliste et pathétique dont témoignent ici les deux statues de saint Jean et Marie (n°41-42) qui devaient entourer le calvaire d'une poutre de gloire.
Le thème de la Pieta (n°45) trouve également son épanouissement à cette époque. L'idée d'une Passion de la Vierge, parallèle à celle du Christ, est une idée favorite des mystiques que nous venons d'évoquer. La figure de la mère portant sur ses genoux le cadavre de son fils, apparue dans les manuscrits v ers 13809 résume ainsi la Passion de la mère de Dieu.

Piéta, musée d'Arras
Piéta, musée d'Arras


La plupart des Pieta furent réalisées à la fin du XVe siècle et dans les premières années du XVIe siècle. A la fin de la même époque se développent les confréries de Notre-Dame de Pitié. Le corps du Christ d'une rigidité cadavérique, une expression de douleur très forte confèrent à ces sculptures une charge émotive d'une grande densité.

Saint-Evêque; statue du 15ème; musée d'Arras
Saint-Evêque; statue du 15ème; musée d'Arras



Saint Nicolas; statue; musée d'Arras
Saint Nicolas; statue; musée d'Arras



Saint Paul; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras
Saint Paul; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras



Saint Paul; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras
Saint Paul; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras



Saint Pierre; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras
Saint Pierre; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras



Saint Pierre; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras
Saint Pierre; vers 1440-1460; vient de l'église de Dainville; musée d'Arras



Sainte Marguerite; statue du 15ème; musée d'Arras
Sainte Marguerite; statue du 15ème; musée d'Arras



Sainte Marie-Madeleine; statue de la 2ème moitié du 14ème; musée d'Arras
Sainte Marie-Madeleine; statue de la 2ème moitié du 14ème; musée d'Arras



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