FRANCE, HAUTE-LOIRE, LE PUY-EN-VELAY, EGLISE SAINT-LAURENT
Le Puy-en-Velay (43) - Eglise Saint Laurent
Le Puy-en-Velay (43) - Eglise Saint Laurent
A l'intérieur, la nef voutée d'ogives est animée par la pierre grise - brèche volcanique - des piliers et des arcs qui contraste avec les enduits clairs.
Le décor sculpté se concentre dans le choeur sur les sépultures de célèbres personnages : contre le mur sud, le tombeau du connétable Bertrand Du Guesclin, figure héroïque de la Guerre de 100 ans, mort en 1380 en combattant à Chateauneuf de Randon, dans le Gévaudan; en face, l'enfeu sculpté (tombeau dans une niche) de l'évêque Bernard de Montaigu (1245), entouré des épitaphes peintes des Vicomtesses de Polignac, dont l'église est la nécropole familiale.
Le décor peint est présent dans les peintures murales de la salle capitulaires (14e s.) et de la chapelle sud de l'église (15e s.).
Des tableaux de Guy François (1578-1650), peintre local de grande réputation influencé par Le Caravage, se trouvent dans les bas côtés : L'incrédulité de Saint Thomas, La Vierge du rosaire et Le miracle de saint Hyacinthe. On peut admirer d'autres oeuvres de l'artiste dans différentes églises de la ville (église du Collège, église Saint-Pierre des Carmes) et surtout au musée Crozatier.
HISTOIRE
C'est une église gothique du 14ème siècle, réaménagée au 19ème siècle par la volonté passionnée de Pierre Eynac, curé de la paroisse, et restaurée récemment.
C'est en 1221 qu'Etienne de Chalencon évêque du Puy et le Chapitre donnent aux Dominicains, Frères Prêcheurs, une église (déjà dédiée à St-Laurent) et un petit hôpital.
En 1340, comme l'indique l'inscription au bas du pilier qui soutient la chaire, l'église est reconstruite, plus grande, grâce à la volonté et aux dons de la puissante famille des Polignac. Les entrailles de Duguesclin y dont déposées dans un enfeu en 1380. Elle peut accueillir par exemple : en 1447, le chapitre général des Frères Prêcheurs, en 1556 les fidèles pour la représentation de la Passion du Christ, organiser de somptueuses funérailles aux vicomtes et vicomtesses de Polignac.
La voûte s'effondre en 1417 et 1525, chaque fois reconstruite. Le 5 août 1562, les protestants qui assiègent en vain Le Puy, saccagent l'église et le couvent qui sont hors les murs. Mais les religieux n'abandonnent pas et les restaurent. Ils poursuivent leur mission de "prêcheurs" ; leur école de philosophie et de théologie est réputée.
En 1790, leur maison est fermée par les révolutionnaires, les frères sont dispersés, leurs biens vendus et l'église sert de remise.
Rendue au culte au début du 19ème siècle, elle sera réaménagée par Pierre Eynac (curé de 1826 à 1865) qui déplace le portail d'entrée du Sud à l'Ouest (Cf. plan) et y ajoute deux portes latérales et un fronton orné d'une statue de St-Laurent.
En 1971, la voûte menaçant de s'effondrer, l'église est fermée un travail remarquable de restauration est entrepris.
La nuit de Noël 1988, l'église est réouverte. La foule est immense pour admirer et rendre grâce.
ARCHITECTURE
L'architecture est très sobre, alliant grandeur et intimité. La nef reste sombre tandis que l'abside est lumineuse. Cette construction gothique est influencée par le gothique languedocien qui réduisait les ouvertures et utilisait les contreforts extérieurs plus que les arcs-boutants.
Le choeur, dégagé à l'origine, accueillait les moines. Les chapelles "c" et "d" sont construites après 1380, les chapelles "a" et "b" au 15ème siècle (cf. plan).
Les voûtes atteignent 15,55 m de hauteur dans la nef centrale et 13,20 m dans les collatéraux. Les poussées exercées par la voûte ne sont pas contrebutées suffisamment : les piliers se sont inclinés vers l'extérieur. C'est très visible au bas-côté sud (point 1 sur le plan). La voûte menaçait de s'effondrer. Le toit a donc été enlevé.
Entre 1975 et 1978 quatres pinces en béton précontraint (cf schéma) ont été tendues entre les deux rives de l'édifice au niveau de chaque arc doubleau entre les voûtes et la toiture qui fut ensuite rétablie. Cette technique très moderne permet d'arrêter l'écartement progressif de la nef et de n'introduire aucune modification dans l'architecture apparente de l'édifice.
LES VITRAUX
Ils ont deux fonctions : introduire la lumière et enseigner. La plupart, restaurés, datent du 19ème siècle : ce sont, au centre de l'abside, les mystères du Rosaire (Joyeux, Douloureux et Glorieux), et le long des collatéraux, des Saints.
Quelques-uns ont été créés par un maître verrier contemporain Makaraviez, en collaboration avec le Père Roger Gras curé de la paroisse. Ce sont :
- La rosace (au-dessus du portail Ouest) : la Vierge entourée des anges musiciens.
- Les oculis (fenêtres rondes) au Sud, la Jérusalem Céleste, au Nord, l'entrée dans l'Eglise par le baptême.
- Chapelle du collatéral Sud ("c" sur le plan) : il faut lire ce vitrail du St-Sacrement du bas vers le haut, à droite : c'est le pain, son travail et son offrande; à gauche : c'est le vin, son travail et son offrande; au centre : le travail humain et son offrande; tout en haut, une flamme : c'est Dieu, feu, amour et lumière.
LA SCULPTURE
Elle est peu développée, peut-être à cause du chantier contemporain de la Chaise-Dieu. Signalons la clé de voûte au-dessus de l'autel avec Saint Laurent (2), celle au-dessus de la première travée occidentale aux armes des Polignac (3).
Le porche d'entrée et les fonds baptismaux néo-gothiques flamboyants du 19ème siècle sont dûs à Savel dont on a retrouvé des billets signés.
L'autel, dû à Philippe Kaeppelin en 1966, est porté par des Séraphins. Ils ont 6 ailes : deux ailes pour voler, deux ailes pour se voiler la face, deux ailes pour se cacher le corps.
LES ENFEUX DU CHOEUR
A droite l'enfeu de Duguesclin mort en 1380, à Châteauneuf de Randon (4). Ses entrailles sont ici tandis que ses os sont à St-Denis et son coeur à Dinan. Son gisant le représente sans casque, car il n'est pas mort au combat, avec un chien à ses pieds. Son blason est d'argent à l'aigle à deux têtes.
L'inscription dit : "Ci-gît noble et vaillant messire Bertrand du Clairkin, Comte de Longueville, jadis connétable de France qui trépasse en l'an 1380, le quatorzième jour de juillet".
A gauche celui de Bernard de Montaigu évêque du Puy au 13ème siècle avec des Saints Dominicains autour de la Vierge (5). Son gisant a disparu lors des guerres de religion en 1562.
Autour de ces enfeux, un décor peint inspiré des tissus orientaux, et des inscriptions en latin énumérant les noms des vicomtes (à droite) et des vicomtesses (à gauche) de Polignac inhumés dans l'église.
L'EBENISTERIE
Dans le choeur, les lambris sont du 18ème siècle de même que les stalles destinées aux religieux.
Le reste du mobilier admirablement restauré est du 19ème siècle: les confessionnaux, la chaire et les trois portails d'entrée. Cette unité stylistique est assez exceptionnelle.
LES TABLEAUX
Trois d'entre eux sont signés de Guy François (1578-1650), né au Puy, qui a séjourné quelques années en Italie, à rencontré le peintre vénitien Saraceni. La lumière, la couleur, contribuent à exprimer le caractère surnaturel des scènes représentées.
- L'incrédulité de St-Thomas (bas-coté Nord) avec au centre le Christ lumineux, St-Thomas qui tend sa main vers la plaie.(6)
- Le rosaire : la Vierge donne le rosaire à St-Dominique tandis que l'Enfant Jesus le donne à St-Louis. Notez la présence du chien qui porte la flamme, la Lumière de Dieu (Domini Canis).(7)
- St Hyacinthe qui sauve un ostensoir et une statue de la Vierge du pillage de son couvent de Cracovie par les Tartares.(8)
LE PAVAGE
Sa création a été confiée à Daniel Dezeuze, membre fondateur en 1970 du groupe "Support-Surface", dominé par l'abstraction, ce dallage couvre plus de 1400 mètres carrés où alternent le noir, le blanc et le rouge, parcourus par un tracé fait de résine synthétique incrustée. On peut y voir, indépendamment de la volonté de l'artiste, l'arbre de vie qui part de la mort (noir) pour aboutir à l'espace de Résurrection (rouge). En l'absence de bancs tout est beaucoup plus visible (Cf schéma).
Le quadrillage sous le porche et derrière l'autel doit faire penser à la grille de St-Laurent. St-Laurent, à cause de sa foi, fut brûlé sur un gril, au 3ème siècle.