FRANCE, AUDE, CARCASSONNE, NOTRE-DAME DE L'ABBAYE



Carcassonne - Notre-Dame de l'Abbaye

Midi-PyrénéesCarcassonne Notre-Dame de l'Abbaye à Carcassonne CarcassonneMidi-Pyrénées

Un peu d'histoire

Le site de Notre Dame de l'Abbaye pourrait être l'emplacement du premier lieu de culte chrétien de Carcassonne. En effet, deux hypothèses partagent les historiens à ce sujet. Les uns pensent que ce premier lieu de culte devait se trouver à l'intérieur de l'édifice fortifié, la Cité romaine. Les autres supposent que ce site pourrait se trouver à Notre Dame de l'Abbaye qui était longée par la Voie Aquitaine, voie romaine allant de Narbonne à Bordeaux, (rue Trivalle). Cette hypothèse peut être confortée par la découverte d'une pierre tombale du VI s., d'époque wisigothique qui avait été réutilisée comme matériau de construction en 1964. De plus, il est fait mention d'une cave taillée dans le roc utilisée comme lieu de culte par les premiers chrétiens. Cette cave aurait servi de crypte aux Capucins au XVIe s. mais elle n'a jamais été découverte. Elle pourrait donc être le premier monument chrétien c'est-à-dire la première cathédrale de Carcassonne.
Au VIIIe s., les razzias arabes sont nombreuses en Septimanie et Carcassonne n'y échappe pas. Elles ont été relatées dans leurs chroniques contemporaines qui ont été par la suite étudiées et reprises par des historiens arabes Ainsi grâce a ces historiens nous connaissons cette église au VIII s. Ainsi, dans les Analectes, Ahmad- al Maqqarî, écrivain nord africain (XVIIe s.), il relate les propos d'un historien arabo-andalou du XIe s., Ibn Hayyân qui mentionne une : "place forte parmi les forteresses de l'ennemi, qu'on appelle KARKACHONA...et là se trouve l'église vénérée des Francs appelées CHANTE-MARIYA". Il y a : "dans cette église sept colonnes d'argent pur, les témoins n'en ont pas vu de pareilles: un homme ne pourrait pas en entourer une avec toute la longueur de ses deux bras". D'autres sources arabes confirment ces descriptions et les complètent tel les écrits fragmentaires de Al-Bakrî (XI s.) conservés à la bibliothèque de la mosquée d'Al-Qarawîyîn de Fez, qui font mention de "Et à KARKACHONA se trouve cette église très vénérée chez eux (les Francs) qui s'appelle CHANTE-MARIYA GHRATHIYA. Il y a dans cette église sept colonnes d'argent et il existe un jour de fête où viennent les barbares de toutes les contrées ". Grâce à ces chroniques nous savons qu'à cette époque le vocable de l'église était : Sainte-Marie de Grâce et qu'il y avait un pèlerinage marial important. Malheureusement, il n'existe plus aucun vestige de cette église qui a été probablement détruite au cours d'une des razzias vers 720.
Une nouvelle église a été sûrement reconstruite de suite. D'ailleurs, le fond de la nef correspond sans doute à cette époque étant donné l'architecture de la fenêtre.
Jusqu'au X s., cette église accueille le siège cathédral. En effet, c'est au début de ce siècle que l'évêque Gimer (futur saint Gimer) décide le transfert du siège cathédral à l'intérieur de la Cité où un nouvel édifice religieux est en construction. Il s'agit de l'actuelle basilique Saint Nazaire et Saint Celse.
C'est à peu près à la même époque, 926, que l'église change de vocable, elle s'appelle désormais Sainte-Marie du Saint-Sauveur.
Elle sera desservie par des chanoines réguliers qui suivent la règle de saint Jérôme et de saint Augustin. Ils avaient pour devoir en plus des prières et du travail intellectuel, d'évangéliser la population.
Le 11 juin 1096, le Pape Urbain II célèbre la messe dans cette église avant d'aller bénir la construction de la cathédrale romane, Saint Nazaire et Saint Celse.
L'église change de nouveau de vocable au XIIe siècle pour celui de Notre-Dame de l'Abbaye car le supérieur des chanoines vivant sous la règle de saint Jérôme et de saint Augustin a le titre d'Abbé d'où le titre d'Abbaye donné à leur église.
En 1209, saint Dominique et quelques autres prédicateurs viennent prier dans cette église.
En 1240, lors de la tentative infructueuse de Raymond Trencavel II de reprendre la Cité et des représailles qui en suivirent, l'église et les bâtiments religieux ont été presque totalement détruits.
Sept ans plus tard, saint Louis accorde son pardon à ceux qui ont suivi Trencavel. Il autorise la construction d'un nouveau bourg sur la rive gauche du fleuve, l'actuelle Bastide Saint Louis et à relever les ruines de l'église Sainte-Marie. C'est une église de style gothique qui est élevée, de plan classique en forme de croix latine. Elle a été reconstruite par les habitants du bourg.
Mais ce n'est qu'en 1264 que les chanoines reviennent y résider. Ils se chargent d'y former de nouveaux chanoines. Auparavant, faute de logements, ils descendaient de la Cité pour y célébrer l'office.
Dans la fin du XVIe siècle, les guerres de religion et les oppositions qui en suivirent entre la Bastide et la Cité provoquent la ruine de l'église. Le duc de Joyeuse, maître de la Cité, occupe l'église Notre-Dame avec une forte garnison. Le baron de Mirepoix, maître de la Bastide, l'assiège au canon. Le chapitre est dans l'obligation de l'abandonner. Elle est en très mauvais état et les bâtiments qui l'entourent sont en ruine. Ils deviennent le refuge des pestiférés.
C'est dans cet état que les Capucins la trouvent lorsqu'elle leur est donnée en 1592. C'est grâce à un carcassonnais, Me Moureau, conseiller du Roi, secrétaire et greffier du Parlement qui entreprend les premiers travaux à ses frais, que les Capucins décident de s'y installer. Pendant deux siècles, ils la restaurent, l'agrandissent et construisent leur couvent tel qu'il subsiste encore aujourd'hui.
En 1792, les Capucins sont expulsés. Le couvent, aliéné par la nation, est transformé par son nouveau propriétaire en usine de draps et l'église en magasin.
Mgr de Bonnechôse la rachète en 1842 et son successeur, Mgr de la Bouillerie y installe un pensionnat de jeunes filles. Il va abriter par la suite le Grand et le Petit Séminaire. Depuis, cette chapelle appartient au diocèse de Carcassonne.
L'église a été entièrement restaurée en plusieurs étapes, dans la seconde moitié du XXe siècle.

Description

La nef, unique, à trois travées était couverte, à l'origine, par une charpente apparente. Elle n'a été voûtée qu'en 1739 (millésime sur la deuxième travée). Le mur occidental pourrait être un des rares vestiges de l'église préromane.
Les deux chapelles latérales n'ont pas été construites à la même époque. Celle du nord date du XIVe s., elle devait être décorée par un retable en pierre polychrome dont des fragments ont été retrouvés insérés dans les murs. La chapelle du sud a été construite par les Capucins qui voulaient agrandir le choeur, à la place du portail d'origine qui a été déplacé au fond de l'église (1677).
Le choeur est composé d'une abside heptagonale voûtée d'ogive dont la clef de voûte porte comme sculpture la Vierge à l'Enfant. Elle est flanquée de deux absidioles pentagonales voûtées d'ogives, dès l'origine. Les sculptures sont certainement dues au même atelier qui a travaillé à la future cathédrale Saint-Nazaire et Saint-Celse (troisième quart du XIIe s.). Les vitraux du choeur sont du maître verrier Gérard Milon (1970).

Extérieur

Le porche et le portail ont été déplacés en 1677 mais des aménagements ont été réalisés en 1704 comme nous le prouve la date sur la clé de voûte. Il remplace celui qui a été comblé par les Capucins pour bâtir la chapelle du sud. Il est décoré d'une archivolte surmontée d'une croix. Les culots sont ornés de feuillages souples.
Le couvent a été lui aussi édifié par les Capucins. Il a été plusieurs fois agrandi tout au long du XVI et XVIIe s. Il a pris son aspect définitif à la fin de ce dernier siècle, c'est-à-dire le cloître actuel avec le premier étage.
Aujourd'hui, Notre Dame de l'Abbaye a été transformée en hostellerie et reçoit en plus des séminaires et des colloques.

Plan

Plan

Choeur :

Stalles (XVIII s.). A remarquer leurs miséricordes sculptées. Elles proviendraient de l'Abbaye de Fontfroide.
- statue de la Vierge (A)
- Clés de voûte: La Vierge et l'Enfant Jésus en train de se regarder. (B)
- L'Agneau Pascal (C)

Chapelle de la Vierge :

Chapiteaux sculptés du XIIIe s..
Tableau : Assomption de la Vierge

Chapelle dite des Capucins :

Car ceux sont eux qui l'ont construite à l'emplacement de l'ancien portail en 1677. Elle est dédicacée à Saint Félix de Cantalice. Aujourd'hui, elle accueille des oeuvres provenant de l'ancien couvent des Capucins détruit en 2001.
- Saint François d'Assise soutenant le Christ en train de se détacher de la Croix, Jacques Ourtal, 1950.
- Croix provenant du Monument aux morts 1es Capucins de la guerre 1914-1918. Monument qui est en train d'être restauré.

Porche (XVIIe s.) :

Construit par le Capucins, le millésime 1704 sur la clé de voûte du porche montre qu'il y a eu certainement des aménagements quelques années plus tard.
Vitraux du maître verrier Gérard Millon (1970).

Chapelle de Sainte Anne :

Chapiteaux sculptés du XIIIe s. dus, sans doute, au même atelier qui a travaillé à ce qui est, aujourd'hui, la basilique saint Nazaire et saint Celse.
L'orgue été construit par Michel Roger entre 1900-1915 pour le Petit Séminaire et agrandit plus tard par Maurice Puget.
Pierre sculptée en damier, époque wisigothique, réemployée en matériau de construction, redécouverte en 1946.

Chapelle saint Roch :

- Marbre provenant d'un édifice romain réemployé à la période carolingienne pour en faire un autel.
- Tableau L 'Annonciation
- Sarcophage wisigoth (V s.)
- Porte des morts


Bref historique de la présence des Capucins à Carcassonne

1573 Première apparition des Capucins en France, par une autorisation du roi Charles IX. Première implantation des Capucins à Carcassonne : Faubourg est de la ville, au pied de la Cité, sur les lieux dits "Notre Dame de l'Abbaye", actuellement 103 rue Trivalle.
1590 Pendant les guerres de religion, l'église et les bâtiments sont mis en fort pitoyable état et pleins de ruines. Ils servent d'asile aux pestiférés.
1592 Les Capucins se déterminent à fonder en ce lieu une communauté religieuse.
1595 Une bulle du pape Clément VIII vient confirmer l'établissement des Capucins à Notre Dame de l'Abbaye.
1610 Christophe de l'Estang, évêque de Carcassonne, consacre l'église restaurée et sauvée de la ruine
1739 Construction de la voûte remplaçant la charpente visible et construction d'une chapelle latérale.
1792 Les Capucins sont expulsés. Le couvent est vendu. Une usine à drap est installée dans les bâtiments. Les Capucins s'expatrient en Espagne, pendant et après la Révolution.

Deuxième implantation des Capucins à Carcassonne

1867 Achat d'un terrain situé entre les "Cazernes" et les rives de l'Aude. Construction du couvent sur les plans d'un couvent italien. Leur présence va donner le nom à ce nouveau quartier de Carcassonne.
1868 Bénédiction de l'église par Monseigneur de la Bouillerie en la fête de Saint Antoine, dédiée aux stigmates de Saint François.
1901 Loi des Associations pour tout citoyen qui veut se mettre en association - sauf pour les Congrégations religieuses qui doivent se dissoudre, avant d'obtenir le droit de vivre en association : ce qui leur furent refusé.
1903 Procès du tribunal de Carcassonne pour non observance de la loi de 1901 : expulsion du couvent "manu militari"
1914 Le couvent est ouvert pour devenir un hôpital en arrière.
1923 Le couvent est habilité à recevoir la communauté religieuse des Capucins : retour d'Espagne. Rénovation des bâtiments et de l'église. Erection de la Chapelle dite du Crucifix et du Monuments aux morts. Peinture de Jacques Ourtal.
2002 10 octobre : signature de la vente du couvent et destruction immédiate d'une partie du couvent et de l'église. Après demande express d'arrêt de la démolition, sauvetage des toiles de Ourtal. Transfert d'un certains nombre d'objets et de tableaux à Notre Dame de l'Abbaye, premier lieu d'implantation des Capucins à Carcassonne.
2004 Mise en place dans l'ancienne chapelle dite "des Capucins" dans l'église de Notre Dame de l'Abbaye, du Crucifix, d'une toile de Ourtal (Saint François au pied de la Croix). Manquent 2 toiles : anges veillant sur la cathédrale de Reims en flamme et sur l'ancien couvent détruit en 2002.


Saint Félix de Cantalice

Né à Cantalice (Italie) en 1513, mort à Rome en 1587.
Entré dans l'ordre des Capucins, il remplit durant 40 ans à Rome l'office de quéteur et devient l'objet de la vénération populaire, par sa piété, ses austérités et son dévouement anvers les victimes de la terrible Peste de 1585.
Béatifié par le Pape Urbain VIII, il fût canonisé en 1712 par Clément XI. Cependant, la bulle qui étendait son culte à toute l'Eglise ne fut publiée qu'en 1724 par Benoît XIII.
Fête le 18 mai.
Considéré comme le Premier Capucin canonisé, le couvent de Carcassonne a ouvert cette chapelle en son honeur. La porte d'entrée située à cet endroit fût déplacée vers l'ouest (porte actuelle).


Table d'autel primitif

Table 1Table 2Table rectoTable verso
Cette table d'autel primitif, en marbre de Carrare, est un réemploi. Ce morceau de marbre a été taillé comme parement d'un monument romain reconnaissable à ses cannelures.
A la fin de l'Empire Romain, la communauté chrétienne de Carcassonne qui avait déja un lieu de rassemblement sur la voie romaine (actuellement Notre Dame de l'Abbaye) a utilisé des parements et en le retournant, elle en a fait une table d'autel aux dimensions classiques : 150 cm sur 75 cm.
L'autel chrétien se caractérise par le double signe de la Table : celle du Repas du Jeudi Saint et celle du Sacrifice de la Croix. Sur les autels païens, on faisait couler le sang d'une bête par une rigole. En souvenir de ce rite païen, on a gardé la rigole qui rappelle le sang du Christ versé sur la Croix.
Cette pierre d'autel a été découverte lors du passage d'un camion qui a enfoncé le sol et qui a permis de découvrir cette table qui couvrait un ancien puit romain. C'est pour cela que la table est brisée sur un côté.
C'est le plus ancien témoignage de la présence d'un culte chrétien à Carcassonne. On peut le situer entre le VIe et le VIIIe siècle. Est-ce même le premier autel de Notre Dame de l'Abbaye ? L'archaisme de cet autel pourrait le prouver.


Voir aussi :
Carcassonne



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Carcassonne (Aude) - Notre-Dame de l'abbaye - Interieur de la chapelle
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Carcassonne (Aude) - Notre-Dame de l'abbaye - Vue du cloitre
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Carcassonne - Blason
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Carcassonne - Notre Dame de l'abbaye - Chevet de la chapelle du 14eme
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Carcassonne - Notre-Dame de l'Abbaye - Choeur (1)
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Carcassonne - Notre-Dame de l'Abbaye - Choeur - Voute
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Carcassonne - Notre-Dame de l'Abbaye - Mur
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