Placée sous le patronage de saint Jean-Baptiste, l'église de Jasseron a été édifiée en plusieurs phases de construction, entre le XIIIème et le XVIème siècle.
Extérieur
La façade de l'église était autrefois précédée d'un porche en bois ou "galonnière" qui s'appuyait sur les deux colonnes engagées que l'on voit encore de chaque côté du portail. En mauvais état, elle a été supprimée lors de la restauration de 1968.
Le portail se compose d'un simple arc brisé typique de la première phase de construction.
A sa gauche, on voit, fixé au mur, un pupitre de pierre sur lequel on plaçait le livre des Evangiles ou celui des exorcismes, et qui, à l'occasion, était aussi utilisé pour les lectures publiques et profanes.
A droite se trouve une pierre creusée qui servait de bénitier.
Le clocher a été rasé pendant la Révolution et reconstruit en 1838.
L'abside est couverte d'un toit en lauzes. Au sud, à côté. de l'église, se dresse la croix de l'ancien cimetière.
Intérieur
La nef centrale est couverte d'une belle charpente mise à nue lors de la restauration. A cette occasion, les six piliers de pierre ont été dégagés de l'entourage en plâtre qui les recouvrait.
La deuxième chapelle à droite (au sud) en entrant est sans doute le noyau originel de l'église: elle provient d'un premier édifice religieux. Le sol a été exhaussé comme en témoignent les emplacements de la fenêtre ogivale, de l'enfeu et des deux petites niches (lavatorium, servant à nettoyer les objets cultuels).
La chapelle nord est en revanche la plus récente. Elle a été fondée par Sibuet de la Balme, seigneur de Ramasse et châtelain de Jasseron, qui y fut inhumé en 1536. Elle était placée sous le vocable de saint Georges.
MOBILIER
Chapelles nord
Dans cette dernière chapelle, au dessus de l'autel, on voit trois statues polychromes du XVIème siècle (cl. 1910).
L'une représente saint Maurice en costume de croisé, protecteur de l'ancien village de Saint Maurice, bâti à flanc de côteau au sud-est de la source de Jugnon et abandonné au XVIème au profit du village de Jasseron.
La statue de saint Claude rappelle l'appartenance de Jasseron à l'abbaye de Saint-Claude (ou Saint-Oyen). Quant à l'autre statue, il s'agit peut-être de sainte Catherine tenant un livre.
En redescendant, l'autre chapelle nord abrite la célèbre "Vierge au manteau" ou "Notre- Dame du bon secours", oeuvre du XV-XVIème siècle taillée dans un même bloc de pierre. La Vierge abrite sous son manteau 26 petits personnages parfaitement conservés. Le groupe mesure 1,10 m. Ce thème de la charité se retrouve sur l'une des clés de voûte où un pélican nourrit ses petits de sa propre chair, symbole également du sacrifice de Jésus pour les hommes.
Nef
De chaque côté de la nef, on remarque deux tableaux se faisant face. On retrouve une nouvelle fois saint Claude et de l'autre côté un évêque non identifié. Tous deux sont datés du XVIIème siècle.
Chapelle sud
Dans la plus ancienne (la deuxième), on remarque la statue d'une Vierge à l'Enfant en bois doré et polychrome du XVIIème siècle.
Dans la chapelle dite de Saint Jean-Baptiste se trouvent la cuve en pierre des fonds baptismaux ainsi qu'une statue de saint Jean en bois polychrome du XVIIème siècle.
Les vitraux des deux chapelles sud sont tout à fait remarquables. Dans la chapelle de Sibuet, le vitrail qui l'ornait a été déposé aux archives lors de la seconde guerre mondiale.
Il subsiste néanmoins quelques fragments, dont la représentation de "Dieu bénissant entouré du symbole des évangélistes, accompagnés de phylactère indiquant leurs noms en lettres gothiques.
Dans une autre fenêtre, une "Sainte Face" est présentée par un ange tandis que d'autres anges tiennent les instruments évoquant la passion (le fouet, la colonne, le marteau, les clous, les dés, la lampe ,la corde et les tenailles). Ces vitraux doivent être rattachés à l'influence de Brou, et datent très probablement de la première moitié du XVIème siècle.
A noter également la présence d'une huile sur toile du XVIIème siècle, représentant le Christ en croix (au niveau du choeur).
Tableau de Saint Taurin
Ainsi dénommé, le tableau de notre église, restauré au début de l'année 1984 par M. Jean François PY de ROMENAY, a eu l'honneur de figurer au Musée de Brou pour l'exposition " Peinture religieuse en Bresse au XVIIe siècle " qui s'est tenue du 14 septembre au 4 novembre 1984.
"Comme beaucoup de ses contemporaines, cette toile est anonyme. Nous n'en connaissons pas la provenance. Plusieurs hypothèses ont été émises, peut-être provient-il de la Chartreuse de Sélignat.
Ce grand tableau présente un calvaire : le centre de la composition est occupée par Jésus Christ crucifié, le sang coulant de ses mains, qui regarde sa mère. De l'autre côté se tient Saint Jean, cheveux bouclé mi-longs, revêtu d'une tunique brune, d'un manteau de couleur rouge, qui fait écho au vêtement de la Vierge.
Au pied de la croix, les ossements et le crâne évoquent Adam et rappelle que la mort du Christ a racheté le péché originel.
Dans un ciel d'orage, une éclipse de soleil illustre une prophétie de l'Ancien Testament.
A gauche de la toile est agenouillé Saint Taurin, vieillard à la longue barbe de patriarche. Il est revêtu de son habit d'évêque et tient de la main droite sa crosse, à ses pieds on aperçoit une mitre. Derrière Saint Taurin un lion, deux boeufs et un cerf symbolisent sa victoire sur les trois concupiscences... Il fut le premier évêque d'Evreux... . Après bien des péripéties, ses reliques seront déposées au monastère de Gigny (Jura).
Saint Taurin est le saint thaumaturge et intercesseur par excellence, il guérit les aveugles, les sourds... On disait également qu'il apaisait les épidémies de peste, ce grand fléau du XVIIe siècle. Le culte de Saint Taurin, du fait de la proximité de Gigny devait être très répandu en Bresse...
Le tableau de Jasseron est donc très intéressant par son iconographie : elle traduit bien la foi imagée de son temps qui laisse encore une place importante au merveilleux.
(Extraits du catalogue sur la Peinture religieuse en Bresse au XVIIe siècle, rédigé par Mme Michèle DUFLOT, édité par le Musée de Brou)
LA VIERGE AU MANTEAU (16ème SIECLE)
3ème chapelle, à gauche en entrant
Elle est taillée dans un même bloc de pierre.
La Vierge couronnée a les bras étendus qui soutiennent un manteau aux nombreux plis. Son visage est assez solennel.
26 personnages, 13 de chaque côté, se blotissent auprès d'Elle, grands de ce monde et gens du peuple dans un beau désordre. Leurs attitudes sont souvent assez peu religieuses, voire même frondeuses.
A LA DROITE DE LA VIERGE, au premier rang, debout, le Pape, puis un Clerc agenouillé, tous deux les mains jointes.
A la suite et de face, un bien curieux petit personnage assez peu dévot malgré ses mains, si l'on en juge par l'expression narquoise, hilare même de son visage. Il porte sur sa robe le tablier de cuir des artisans régionaux d'autrefois, auquel du côté droit est attaché un marteau pointu d'un côté et taillant de l'autre. Il est coiffé d'un bonnet de fourrure. L'artiste qui a sculpté ce tableau s'est-il représenté ainsi lui-même. Au 2ème et au 3ème rang nous voyons un Abbé mitré, un chanoine avec son bonnet caractéristique, un clerc tête nue, puis peut-être une femme. Enfin un laïc coiffé d'un chapeau à rebord.
Au dessus.du groupe un musicien souffle à pleines joues dans une longue trompette droite qu'il tient à 2 mains. Derriere lui, la tête dans le pan du manteau, le 13ème acteur tend son bras gauche vers la Vierge et la montre de l'index.
A LA GAUCHE DE LA VIERGE, au 1er rang, à genoux, un roi couronné, puis une matronne de face, la main posée sur la tête de son enfant agenouillé; en fin, un moine en manteau à capuchon et scapulaire: il regarde vers la Vierge, la main droite en visière, curieux ou ébloui.
Au dessus, un cardinal, un évêque mitré, des moines, un laïc barbu au bonnet pointu.Toujours dominant la foule, un autre jongleur musicien aux joues prêtes à éclater avec dans l'angle un dernier personnage qui semble s'accrocher par le bras droit à la manche de la Vierge tout en portant la main gauche à sa coiffure comme pour un salut.
Chacun des personnages a sa physionomie et son caractère bien marqué, on pense à des portraits-charges ou ne manque ni l'observation exacte ni la truculence. D'ailleurs l'artiste, aussi peu conformiste que possible a mélangé systématiquement clercs et laïcs, grands personnages et menu peuple.